Touché depuis quelque jours par une série importante de départs de feux incontrôlés et qui ont surtout nécessités l’évacuation de plus de 50 000 personnes, Israël a rapidement fait appel aux pays du pourtour méditerranéen pour renforcer ses moyens aériens propres.
Après la tragédie du Mont Carmel en décembre 2010, un feu brutal qui avait entraîné la mort d’une quarantaine de personne et avait aussi amené la communauté internationale à dépêcher une flotte aérienne respectable. Israël s’était ensuite immédiatement doté d’une escadrille d’avions de lutte contre les feux de forêts, aujourd’hui mise en œuvre par Elbit Systems, qui compte désormais 14 Air Tractor AT-802F.
Un des AT-802F en opérations en Israël sur les feux péri-urbains de ces derniers jours. (Photo : Y. Sagi)
Bien que relativement performants, ces avions, ainsi que les sapeurs-pompiers qu’ils épaulaient, ont rapidement été débordés par les innombrables départs de feux, essentiellement d’origine volontaires, en lisières de zones habités. Plus de 10 000 ha ont été dévastés et de très nombreuses habitations ont été détruites.
3 CL-415 grecs, 2 croates et 2 italiens, 2 CL-215 turcs vont être rejoints le 26 novembre par un module européen constitué de 2 CL-415 et un Beechcraft King Air 200 de la Sécurité Civile française. Bien que dépourvu de tout moyen optronique, ce dernier appareil permet d’assurer les liaisons, les missions d’investigation et de reconnaissance à vue, mais surtout la coordination des moyens engagés. C’est un outil de commandement dont le rôle ne doit surtout pas être négligé.
« Bengale 96 », un des trois Beech King Air 200 de la Sécurité Civile.
De son côté, la Russie a dépêché sur place deux Beriev 200 d’Emercom, tandis que Chypre a envoyé un avion dont le type n’a pas été communiqué et l’Angleterre un hélicoptère. Preuve de bonne volonté, deux hélicoptères égyptiens sont également attendus, une aide qui ne sera pas seulement symbolique, tout comme les camions de pompiers palestiniens qui sont déjà à pied-d’œuvre aux côtés de leurs confrères israéliens.
Un des Beriev 200 d’Emercom, l’agence Russe en charge des risques naturels dont font partie les feux de forêts. (Photo . Emercom)
Tout ce petit monde va être épaulé par le Tanker 944, le Boeing 747-400 N744ST de Global Supertanker Services (GSS), l’appareil de lutte contre les feux de forêts superlatif, qui a été convoyé depuis Colorado Springs le 25 novembre et qui devrait débuter les opérations rapidement ; ses capacités d’emport de 75 tonnes de retardant pouvant se montrer particulièrement précieuses dans ce contexte.
Suivi du convoyage du Tanker 944 le 25 novembre 2016 sur Flightradar24.
La présence du Supertanker n’a rien d’anecdotique. Il est dans la lignée de l’intervention du Supertanker d’Evergreen, aujourd’hui retiré du service après la faillite de l’entreprise, sur le feu du Mont Carmel il y a 6 ans. Mais pour son opérateur, GSS, l’enjeu est de taille puisqu’il va s’agir de la première utilisation opérationnelle de son avion qui a effectué ses premiers vols d’essais cet été et qui a reçu son agrément des autorités américaines il y a tout juste quelques semaines. Les opérations en Israël vont donc être l’occasion de montrer les capacités de l’appareil et, pourquoi pas, de convaincre les autorités américaines ou d’ailleurs, de faire appel à cet appareil hors norme.
Le premier largage d’essais du Tanker 944 cet été. (Photo : GSS)
L’engagement du Supertanker est aussi la démonstration des capacités de cet appareil car il ne lui a fallu que 12 heures pour rejoindre Tel Aviv depuis Colorado Springs, une capacité de déploiement à longue distance clairement exceptionnelle. Le plus compliqué, pour GSS, ayant été de battre le rappel de ses hommes, partis célébrer Thanksgiving en famille.
Le Boeing 747-400 N744ST Tanker 944 à son arrivée à Tel Aviv le 25 novembre 2016. (Photo : I24News)
Les yeux de toute la communauté des pompiers du ciel sont donc tournés vers la région d’Haïfa. Les premiers vols et les premiers largages opérationnels du Boeing 747 seront scrutés et analysés. Savoir si GSS est en mesure de relever le pari d’utiliser un jumbo jet pour combattre les feux, tenté initialement par Evergreen, étant un des enjeux majeurs des opérations de ces prochains jours.
Le sujet est revenu au premier plan à plusieurs reprises ces dernières années, en particulier cet été après le problème de train d’atterrissage sur le Pélican 42 en plein cœur de la saison des feux : « nos Canadair » vieillissent et il serait temps de songer leur offrir un successeur ! Bonne idée ! Mais il y a-t-il vraiment urgence et quelles sont les solutions possibles ?
En service depuis plus de 20 ans au sein de la Sécurité Civile, le CL-415 est-il un avion irremplaçable ?
Le 1er août dernier, le CL-415 « Pélican 42 » était victime d’une rupture du train d’atterrissage droit lors d’un roulage à Ajaccio. Cet accident a entraîné l’interdiction de vol temporaire de l’ensemble de la flotte des « Canadair » français pendant quelques jours, le temps que de minutieuses inspections soient menées pour déterminer la cause précise de cet évènement afin d’éviter que le problème ne survienne sur un autre appareil.
Accidenté à Ajaccio le 1er août dernier, le Pélican 42 devrait être disponible à nouveau pour la saison prochaine. Cette image, prise sur la base de Marseille-Marignane, sera alors entrée dans l’histoire après le déménagement vers Nîmes.
Depuis, les commentateurs continuent de s’interroger : et si il était temps de remplacer ces avions ?!
Dans un premier temps, et en attendant les conclusions de l’enquête technique, rien ne dit que l’accident du 42 est la conséquence d’une usure et que l’âge de l’avion est en cause dans l’évènement. L’interdiction de vol temporaire qui leur a été imposée pendant quelques jours était un choix opérationnel fort de leur exploitant car contrairement à ce qu’il peut parfois se passer dans des circonstances souvent bien plus dramatiques, le certificat de navigabilité des avions CL-215-6B11 n’a pas été levé, ce qui explique que les appareils en service dans les autres pays ont pu continuer leurs missions habituelles.
Les avions français sont parmi les plus anciens en service. La flotte française de CL-415 est composée de 12 appareils livrés entre 1995 et 1997 (Pélican 31 à 43) dont trois exemplaires ont été détruits en 1997 (P43), 2004 (P41) et 2005 (P36) puis trois appareils commandés pour combler les pertes, reçus entre 2004 et 2007 (P44, 45 et 48). La majeure partie de la flotte a donc une vingtaine d’années de service mais les plus récents ont une décennie de moins.
Tableau d’effectif des CL-415 français (1995-2014)
Ces avions volent relativement peu en raison de la nature de leur activité et de sa saisonnalité. En fait leur activité est comparable à celle des avions de combat d’une force aérienne occidentale. En 2003, année de canicule où 74 000 hectares de forêts sont partis en fumée, les 11 CL-415 français alors en service ont effectués un total record de 5 542 heures de vol soit une moyenne de 503 heures par appareil. L’année suivante, beaucoup plus calme avec 12 500 hectares brûlées, les 11 appareils ont effectué un total de 2 746 heures de vol soit 249 heures par avion. En 2011, autre année moyenne (9 400 hectares), le total du secteur Canadair a été de 2 848 heures, soit 237 pour chacun des 12 avions en ligne.
Opérant en noria, les « Canadair » français ont depuis longtemps fait la preuve de leur efficacité.
Pour autant, l’usure n’est pas le seul critère à devoir être pris en compte pour l’analyse de l’âge de la flotte car les opérations de maintenance ont lieu tout autant en fonction d’un temps de vol défini que d’échéances calendaires précises.
En général, un aéronef a une carrière qui est de l’ordre d’une trentaine d’années, mais les avions capables d’aller au-delà sont innombrables. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour ceux-là ? Le prédécesseur CL-215 prouve que, bien entretenu et bien utilisé, dépasser le demi siècle de service est tout à fait possible, et que dire des Firecat dont les cellules ont été construites il y a 60 ans ? Cependant, lorsqu’une flotte arrive à la vingtaine, c’est le bon moment pour s’interroger sur la succession sans être dans l’urgence. Gouverner c’est prévoir. Quelles sont les solutions et les successeurs possibles ?
Dernier appareil livré à la France en 2007, le Pélican 48 a été numéroté ainsi car les numéros de coque 46 et 47 avaient déjà été portés auparavant par des CL-215.
Partons du principe que, pour ne pas déroger à la règle de complémentarité écopeur-tanker qui a fait le succès de la Sécurité Civile, le remplaçant du CL-415 devrait être un écopeur. Or, cette catégorie d’aéronefs ultra-spécialisés ne comporte qu’une poignée de types d’appareils en production ou disponibles.
Livré en 2006, le Pélican 45 fait partie des aéronefs les plus récents de la flotte actuelle.
En premier lieu se trouve le Fire Boss, version à flotteur de l’AT-802F, monoturbine d’une capacité de 3 000 litres environ, ses capacités d’emport, et donc de frappe, demeurent largement inférieures à celles d’un CL-415. Appareil peu onéreux, son prix d’achat tourne autour de 3,5 millions $, il est très répandu au Canada, aux USA, en Espagne, en Croatie ou en Italie, par exemple.
En 2013, dans le cadre du projet de remplacement des Firecat, deux AT-802F « terrestres » ont été longuement évalués à Marseille. Trop sensibles au vent, très lents, monomoteurs, ces avions n’ont clairement pas convaincus comme aéronefs d’intervention à l’échelle nationale. La version à flotteurs est légèrement plus lourde d’une tonne ce qui impacte sur sa charge utile. La traînée des flotteurs réduit également sensiblement sa vitesse. Ses chances de pouvoir prétendre à prendre le relais des CL-415 français sont donc très faibles.
Version amphibie de l’Air Tractor AT-802F évalué au cours de l’été 2016, le Fire Boss a peu de chance de pouvoir prétendre à la succession du CL-415 en raison de ses performances très en retrait.
Deux ans plus tôt, pendant l’été 2011, c’était le Beriev 200 qui était présent à Marseille pendant un mois. Avec des performances alléchantes, 12 000 litres, 700 km/h, le jet russe semblait clairement très prometteur et pendant longtemps, grâce à une campagne de presse extrêmement efficace, l’avion a fait figure de successeur idéal pour l’amphibie canadien. Las, les pilotes français qui l’ont patiemment essayés ont noté des lacunes importantes. Choix impératif entre carburant et charge d’eau, consommation effrénée de carburant en basse couche, programmation inadaptée des commandes de vol électriques, absence d’aérofrein entre autres ont relégué le Beriev parmi les solutions secondaires. De plus, à l’époque, la production de l’appareil était interrompue. Cette situation a évolué depuis avec plusieurs avions commandés pour Emercom, actuellement en cours de construction, et une récente commande chinoise pour au moins deux avions. On parle toujours d’une possibilité de production sous licence aux USA, une idée qui est régulièrement relancée par ses promoteurs qui estiment pouvoir proposer un prix unitaire de 40 millions $ par amphibie, ce qui n’a rien d’extravagant.
Appareil aux performances alléchantes, le Beriev 200 demeure encore un échec commercial évident.
Si les lacunes identifiées par les pilotes français sont prises en compte pour une éventuelle version « occidentalisée », le Beriev pourrait redevenir une option solide, d’autant plus que 80% des plans d’eau écopables en France sont compatibles avec le jet russe ce qui ne bouleverserait pas trop les méthodes d’emploi. Mais depuis l’évaluation de 2011, le Beriev ne fait plus tout à fait figure de remplaçant désigné aux CL-415.
Pendant plusieurs années, des Twin Otter disposants de flotteurs spécifiques ont assuré la protection des forêts de l’Ontario. (Photo : D. Kennedy)
On sait que le Twin Otter équipé de flotteurs adaptés a longtemps servi de bombardier d’eau dans l’Ontario. Or cet appareil est toujours en production, après une longue interruption, et connaît depuis un succès notable depuis que la société canadienne Viking Air en a lancé une version modernisée, DHC-6-400, au prix unitaire de 6 à 7 millions $. Si l’option « lutte anti-incendie » était initialement proposée, elle n’a pas trouvé preneur.
Là encore, on est en présence d’un avion connu pour sa robustesse et sa fiabilité, mais il est peu rapide, 150 kt en croisière, et sa charge utile, de l’ordre d’une tonne, peine à être comparée avec celle du « Canadair ». L’appareil a donc peu de chances de convaincre même si, là encore, une certaine polyvalence de la cellule, utilisable pour le transport à courte distance, peut constituer un avantage.
En 2016, Viking a enregistré la 100e commande pour son Twin Otter modernisé. L’option bombardier d’eau est possible mais n’a pas trouvé preneur pour le moment.
Or, c’est cette même société Viking Air qui a racheté les droits de la famille CL-215/415 à Bombardier cette année. On sait que, dans un premier temps, la société canadienne va assurer le suivi réglementaire et technique des flottes existantes et sans doute se lancer dans la conversion de certains CL-215 en CL-215T. Une éventuelle reprise de la production du CL-415 reste une question en suspens et va surtout dépendre de la demande. On sait que Bombardier a arrêté la production pour recentrer le groupe, en difficulté, sur des produits plus rentables immédiatement. Une société de moindre envergure comme Viking pourrait avoir une souplesse industrielle plus compatible avec une production en petite série avec un rythme lent. Si des commandes fermes pour de nouveaux CL-415 venaient à être notifiés de la part de clients sérieux, et la Sécurité Civile française, par sa tutelle étatique, en est un, cette solution serait sans doute à privilégier. Et du coup, pourquoi ne pas proposer alors une version mise au goût du jour avec, par exemple une nouvelle avionique, à défaut de pouvoir nettement faire progresser les performances de l’aéronef ?
La possibilité d’acquisition par la France de CL-415 d’occasion semble moins évidente bien qu’elle a été évoquée de façon tout à fait officieuse. Ceci ne résoudrait que partiellement le problème de vieillissement de la flotte et surtout, aucun de ces avions ne semble actuellement disponible à la vente.
Deux autres appareils ont été annoncés comme d’éventuels futurs trouble-fêtes sur ce marché. Le premier est loin d’être un inconnu puisqu’il est en service déjà dans l’aviation militaire japonaise. Il s’agit de l’impressionnant amphibie US-2.
Un des 6 US-2 de la Force Maritime d’Autodéfense japonaise en train de naviguer sur une mer d’huile. (Photo : DR)
Il n’a jamais été évalué en tant que bombardier d’eau, même si son prédécesseur PS-1 l’a été dans les années 70. Avion de secours en mer, il dispose de capacités marines inégalées. Pour la version bombardier d’eau, le constructeur envisage une « constant flow » de 15 000 litres. mais il y a un bémol, et de taille, en dehors du fait qu’il n’a pas encore été évalué avec une soute : son prix estimé à 90 000 000 $. Sa production est aussi confidentielle puisque la marine japonaise a pris livraison de seulement 6 appareils tandis que le contrat avec l’Inde pour 12 machines n’a pas encore été officialisé.
Le US-2 en version bombardier d’eau tel qu’il est présenté par le constructeur. (Vue d’artiste : ShinMeiwa)
Il pourrait en être de même pour le nouvel hydravion chinois Avic AG600, successeur du Harbin SH-5, ce dernier ayant été évalué avec une soute pendant les années 70. Annoncé comme pouvant remplir la mission de bombardier d’eau, l’avion est essentiellement un appareil de patrouille maritime. En attendant son premier vol et de connaître son prix, qui en raison des performances annoncées devrait se rapprocher de celui de l’appareil japonais, il fait, lui aussi, office d’outsider improbable pour le moment.
L’Avic 600 lors de sa présentation officielle un peu plus tôt en 2016. Annoncé comme pouvant prétendre au rôle de bombardier d’eau de grande capacité, il est plus sûrement un hydravion militaire de surveillance maritime.
Mais deux autres solutions, plus radicales peuvent être envisagées, bien qu’il s’agisse ici de scénarios improbables.
En service depuis plus d’une décennie et en lice pour la succession du Tracker, le Q400MR incarne clairement l’avenir d’une partie de la flotte de la Sécurité Civile.
Dans le cas où aucun avion amphibie satisfaisant ne serait disponible, le choix pourrait être fait de mettre l’accent sur les avions « terrestres », autrement dit les tankers. Dans cette catégorie, les options ne manquent pas et ont, pour la plupart, l’avantage d’être abordables puisque basées sur des appareils de seconde main. Le développement de la flotte des Q400MR au delà des appareils envisagés à l’horizon 2022 dans le cadre de la succession des Tracker, ou son complément par des C-130H modifiés, n’aurait rien de ridicule.
Relancé dans son rôle de tanker par la société Coulson, le C-130 est en train de redevenir un acteur essentiel de ce business. (Photo : Skip Robinson via Coulson)
Mais ce choix aurait pour conséquence principale d’impliquer la refonte totale des doctrines d’emplois des aéronefs et d’entraîner un redéploiement des détachements estivaux. Ceci laisserait surtout les collectivité locales, régions ou départements, dans l’obligation de procéder à une réévaluation de leurs besoins propres, ce qui pourrait alors passer par la mise en œuvre de moyens complémentaires. Dans ce cas-là, des avions comme le Fire Boss pourraient trouver leur place dans un dispositif où les contrats locaux deviendraient plus stratégiques. Mais ce serait aussi un premier pas vers une forme de privatisation d’une mission jusque là régalienne. Et ces avions pourraient être suppléés ou épaulés par des voilures tournantes.
Car la succession des CL-415 par des voilures tournantes n’est pas non plus un scénario aberrant, il est même âprement défendu dans les milieux hélicoptéristes. Il faut se souvenir qu’à la fin des années 80, des évaluations très sérieuses d’hélicoptères bombardiers d’eau (HBE) avaient été menées conjointement par la Sécurité Civile, l’Entente Interdépartementale contre les Feux de Forêts et plusieurs industriels dont Aérospatiale, devenue depuis Airbus Helicopters. Lama, Écureuil, Puma, Super-Puma avaient été longuement évalués sur plusieurs saisons et les conclusions étaient plutôt positives. Le lancement du CL-415 et le positionnement de la France comme client de lancement du nouvel appareil, assortis de conditions financières intéressantes, a clairement tué dans l’œuf le développement d’une flotte HBE nationale dotée de moyens lourds. Cependant, ces expérimentations ont conforté les départements dans leur possibilité de louer les services saisonniers de machines de « première intervention » auprès d’opérateurs privés.
Après son évaluation comme HBE durant l’été 2007 et bien qu’estampillé EC225, cet hélicoptère est ensuite entré en service dans l’armée de l’air comme EC725R2 (Photo : Eurocopter)
Au milieu des années 2000, la location saisonnière, de 2004 à 2008, d’un hélicoptère lourd Erickson Aircrane, capable de lever 10 000 litres de retardant, a entraîné un regain d’intérêt pour les voilures tournantes à hautes capacités. En 2007, un EC225 doté d’une soute interne de 4 000 litres a longuement été évalué par la Sécurité Civile, en particulier en Corse. Mais là encore, cette expérimentation opérationnelle n’a pas été suivie d’une mise en service de ce type d’appareil en France.
L’hélico d’Airtelis en action sur le feu de Rognac en août 2016. (Photo : Airtelis)
Cependant, à nouveau, en août 2016, un EC225 de la société Aertelis (RTE) a été engagé lors du feu de Rognac, équipé d’un « bambi bucket », pour renforcer les moyens aériens encore incomplets après l’incident du Pélican 42. Même si cette intervention a été extrêmement ponctuelle et limitée, elle tendrait à montrer que les exploitants et les industriels ont entre les mains des outils dont le potentiel ne demande qu’à être utilisé.
L’utilisation de voilures tournantes puissantes et à la charge utile conséquente au lieu d’appareils amphibies n’a d’ailleurs rien de vraiment inédit puisque c’est ainsi que les HBE sont engagés aux USA. Mais les capacités d’emport des hélicoptères lourds de la famille H225 sont loin d’égaler celles des CH-47, S-61 et autres AirCrane en contrats saisonniers avec l’US Forest Service.
Remplacer les CL-415 par des hélicoptères lourds ne serait pas impossible, mais modifierait aussi profondément la structure de la Base d’Avions (BASC) et du Groupement d’Hélicoptères de la Sécurité Civile (GHSC) et influerait fondamentalement sur les méthodes d’emploi des moyens nationaux.
Néanmoins si ce cas de figure venait à être appliqué, il serait indispensable d’opter pour des machines de grande capacité et dotés de soutes internes afin de favoriser la vitesse d’intervention. La répartition des moyens sur l’ensemble du territoire serait aussi à repenser ce qui pourrait aussi se traduire par une diminution effective de la force de frappe instantanée comparée à celle que peut procurer une noria de Canadair.
Deux types semblent dominer les débats, les Erickson AirCrane qui sont d’anciens CH-54/S-64 reconditionnés et les CH-47 Chinook. Sur le marché de l’occasion, AirCrane ou Chinook sont très rares. Le CH-47F est toujours en production, au prix annoncé de 38 millions $ soit un peu plus cher que le prix auquel le Bombardier 415 était proposé par son constructeur. De son côté la société Erickson rencontre des difficultés financières et s’est récemment placée sous le régime du Chapitre 11 de la loi sur les faillites aux États-Unis, l’équivalent de la procédure de sauvegarde en France.
On peut supposer que les sociétés américaines bénéficient d’une certaine priorité sur l’acquisition des machines réformées des forces US et qu’une exportation vers notre pays ne se ferait pas forcément aux même conditions.
Même si les machines de production européenne n’atteignent pas les performances de ces deux appareils, il est impossible de croire que le monde industriel et le monde politique laisseraient une mission aussi emblématique tomber dans l’escarcelle d’industriels extra européens. C’était cependant le cas avec le CL-415, mais la situation est difficilement comparable puisque cet appareil était alors sans équivalent… Et le demeure !
Mais, surtout, doter la Sécurité Civile d’hélicoptères de transport lourd alors que nos forces armées n’en disposent pas, même si ce besoin est identifié depuis de nombreuses années, pourrait être ressenti comme une véritable provocation et ne manquerait pas de provoquer de sérieux remous.
CH-47 bombardier d’eau en remplacement des CL-415 ? Un scénario improbable mais qui ne manquerait pas de rendre jaloux l’ALAT qui rêve d’hélicoptères lourds depuis des décennies. (Photo : InciWeb)
La solution du remplacement des CL-415 français est donc un problème épineux car aucune solution évidente ne semble se dessiner pour le moment. Mais il n’est pas encore d’une urgence absolue. Il est juste temps de commencer à le préparer. Les investissements consentis pour la succession des Firecat, avec un appel d’offre publié pendant l’été 2016 pour 4 à 6 avions polyvalents, la construction de la nouvelle base de Nîmes représentent des investissements lourds. Ils prouvent bien que, même en ces temps budgétairement tendus, des efforts important sont consentis pour cette lutte importante et médiatique.
Ce dossier se retrouvera en haut de la pile à traiter lorsque celui du remplacement des Tracker sera en cours. Quelle solution sera adoptée ? Il trop tôt, bien évidemment, pour le dire et rien ne laisse penser que les différents scénarios proposés ici seront encore d’actualité.
Le CL-415, et si on en reprenait pour 30 ans ?
Pour autant, une des clés de cette histoire est évidemment entre les mains de Viking Air. En l’absence de remplaçant « naturel » et évident, une relance de la production du CL-415 permettrait, d’une part, de remplacer les avions progressivement, ce qui lisserait l’investissement sur une période large, et d’autre part, d’assurer cette succession avec un matériel connu et éprouvé. Ce scénario serait évidemment le plus simple, le plus évident et pas forcément le plus couteux. Il a donc tout l’air de la solution idéale, d’autant plus que la Sécurité Civile n’est sans doute pas la seule organisation à se poser des questions à l’heure actuelle. Est-ce réaliste pour autant ? La question est posée !
Si l’observation des photos aériennes de Google Earth peut être un moyen simple de spotter sans sortir de chez soi et d’observer des avions rares et originaux, il est aussi possible de trouver les traces d’évènements plus tragiques, qui ont aussi marqué l’histoire de l’aviation. En voici de nouveaux exemples.
Dans les montagnes à une centaine de kilomètres à l’ouest de Tokyo, dans le district de Tano, la forêt porte encore les stigmates d’une des pires tragédies de l’histoire de l’aviation, le vol JL123.
Le 12 août 1985, à 18h12, le Boeing 747SR-46 msn 20783, une version optimisée pour les courts vols à haute densité du marché intérieur japonais, immatriculé JA8119 de la compagnie Japan Air Lines, décolle de Tokyo Haneda à destination d’Osaka avec, à son bord, 509 passagers et 15 membres d’équipage. 12 minutes plus tard, alors que l’avion débute sa croisière à 24 000 pieds, l’équipage contacte le contrôle pour demander à revenir en urgence à Haneda. Mais l’avion semble suivre une trajectoire tout à fait erratique que les opérateurs suivent devant l’écran de leur radar, incrédules. A plusieurs reprises, les pilotes indiquent que l’avion est incontrôlable mais tentent de revenir vers leur point de départ ou de gagner un aérodrome de déroutement possible comme la base militaire américaine de Yokota. A 18h56, l’avion percute le Mont Osutaka, hors de contrôle.
Le Boeing 747SR-46 JA8119 atterrissant à Osaka en 1984, l’aéroport où il fit un « tail strike » en 1978 et qu’il ne parviendra pas à atteindre le 12 août 1985. (Photo : Harcmac60/Wikipedia)
Quelques minutes plus tard, un hélico survole la zone et identifie le site précis de l’accident. La nuit, un terrain difficile et sans accès direct et quelques complications organiques ou administratives firent que les colonnes de secouristes n’arrivèrent sur place qu’une douzaine d’heures après le drame.
Quatre survivantes furent découvertes, quatre miraculées.
D’autres personnes avaient survécu à l’impact mais comme dans bien d’autres cas, l’attente des secours leur a été fatale. 520 morts, c’est le bilan ahurissant de cet accident, le plus lourd impliquant un avion seul, le second plus élevé de l’histoire après la collision de Tenerife et ses 583 victimes 8 ans plus tôt.
Cliché médiocre mais montrant le vol JL123 lors du drame. La dérive, en particulier la gouverne de direction, est clairement manquante. (photo : DR)
L’enquête dura plus d’un an. Une photo prise dans des conditions difficiles par un amateur permit de commencer à comprendre l’origine du drame. La découverte de débris loin du site de l’impact et l’analyse des enregistreurs de vol permirent de comprendre que pendant 32 minutes, les trois hommes dans le cockpit se sont battus avec l’énergie du désespoir, contre un avion qui avait perdu sa dérive, sa pressurisation et qui n’était, effectivement, plus du tout contrôlable.
Les parties manquantes de la dérive. (Extrait du rapport d’accident.)
L’origine du drame remontait en fait au 2 juin 1978.
7 ans avant sa destruction totale, le Boeing 747 avait été victime d’un atterrissage « nez-haut » à Osaka . Ce genre d’incident n’a rien de rarissime, mais dans le cas présent, les dégâts avaient été importants car la queue de l’appareil avait durement touché le sol et en dépit des renforts habituels, plusieurs pièces avaient été arrachées et surtout, la cloison arrière de la zone pressurisée avait été fissurée sous le choc. Pour la réparer, une pièce de renfort avait été ajoutée, mais n’avait été fixée que par une rangée unique de rivets au lieu d’une double rangée comme préconisé par le constructeur. 8832 heures de vol ont ensuite été effectuées avant que cette pièce essentielle ne cède, entraînant la perte de la pressurisation mais aussi celle des systèmes hydrauliques et d’une grande partie de la dérive.
Les dégâts de la cloison de pressurisation arrière. (Extrait du rapport d’accident.)
Bizarrement, quand on observe la zone de l’accident sous Google Earth, on remarque une évolution assez peu logique de la végétation. Sur la photo datée de mai 2010, la zone est déboisée comme toujours marquée par l’impact de l’avion. Deux ans plus tard, une végétation dense occupe le site et en 2015, la zone semble à nouveau déboisée. Il y a sans doute une explication logique, mais laquelle ?
Le 12 août 1985, 524 personnes ont embarqué dans un avion dont le sort avait été scellé 7 ans plus tôt. En plein ciel et pendant une trentaine de minutes, ces hommes, ces femmes et ces enfants ont été les jouets d’une mécanique brisée et sur laquelle personne n’avait plus prise, même si l’équipage a fait l’objet d’un courage, d’une abnégation et d’un professionnalisme que personne ne peut nier. Pendant 30 minutes, plus de 500 personnes on vécu un moment terrifiant avant de rencontrer leur destin. Elles en ont témoigné dans de nombreuses lettres poignantes écrites pendant le drame et retrouvées ensuite dans l’épave. En plus du bilan tragique, ce sont ces circonstances particulières qui font du drame du JL123 un moment clé de l’histoire de l’aviation.
Malheureusement, ce drame n’est pas resté unique.
Le 25 mai 2002 en milieu d’après-midi, le Boeing 747-209B msn 21843 immatriculé B-18255 de la compagnie taïwanaise China Airlines, assurant le vol CI611 devant relier Taipei à Hong Kong tombait en mer une vingtaine de minutes après son décollage avec 206 passagers et 19 membres d’équipage. La localisation du lieu du drame fut rapidement déterminée et les secours ne retrouvèrent aucun survivant. 175 corps furent retrouvés au total. L’analyse des débris permit de démontrer que l’avion avait subit une défaillance structurelle majeure alors qu’il passait 34 900 pieds pour arriver à son altitude de croisière de 35 000 pieds. L’avion avait 64 810 heures de vol en 21 398 cycles accumulés au cours de ses 23 ans d’exploitation, un total élevé, certes, mais qui n’avait rien d’extravagant.
Le Boeing 747-209B immatriculé B-18255 photographié à Kai Tak. (Photo M. Dotti/Planespotters.net)
La cause du drame remontait à 22 ans plus tôt. Le 7 février 1980, sur l’aéroport, très difficile, de Kai Tak à Hong Kong, le B-18255, encore immatriculé B-1866, subit un « tail strike » à l’atterrissage et une partie importante de l’arrière du fuselage avait frotté sur la piste avec des dégâts visibles. Une réparation temporaire fut effectuée sur place et l’avion renvoyé ainsi à Taipei. Un chantier destiné à effectuer une réparation plus perenne fut entrepris au mois de mai suivant. Malheureusement, ces réparations n’étaient pas suffisantes et n’avaient pas été menées en parfaite conformité avec les consignes du constructeurs et se sont lentement dégradées au cours de l’exploitation de l’appareil. Des failles sont apparues mais sont restées non détectées par les équipes de maintenance pour une raison qui a stupéfié les enquêteurs. Sur les pièces incriminées lors de l’accident, un dépôt marron, assez épais et pouvant donc masquer les fissures lors d’inspections visuelles, a été découvert. Il s’agissait de résidus de tabac qui s’étaient accumulés là pendant les années où les fumeurs pouvaient sacrifier à leur mauvaise habitude en vol.
Quand on vous dit que fumer tue…
La zone touchée lors de l’accident de 1980 et dont la réparation a condamné l’avion et ses occupants 22 ans plus tard. (Extrait du rapport d’accident)
L’avion étant tombé en mer, rien n’apparaît donc sur Google Earth.
D’autres cas d’avions condamnés à l’avance existent dans l’histoire de l’aviation, mais dans ces deux cas, les importantes capacités d’emport du 747 en ont aggravé le bilan. Le souvenir des vols JL123 et CI611 est encore présent dans la mémoire collective au Japon et à Taïwan, les circonstances de ces drames les ayant rendus particulièrement cruels.
Pour ce 10e volume de sa collection à succès, l’auteur, également devenu éditeur, a fait preuve d’originalité. En effet, la dernière des 6 histoires que comporte ce volume évoque un pilote qui n’a jamais fait la moindre erreur de pilotage. On pourrait se dire que, du coup, c’est hors-sujet étant donné le titre du livre, mais ce n’a l’est pas tant que ça. En fait, comme signalé en quatrième de couverture, ce pilote a juste oublié un truc pourtant indispensable pour pouvoir piloter un avion de ligne. Cette histoire absolument rocambolesque, tout à fait authentique, est sans doute une des plus extraordinaires de l’histoire de l’aviation contemporaine. (…)
En France, en Europe, l’image qui vient, lorsqu’on évoque la guerre aérienne contre les feux, est celle d’un avion jaune écopant sur un lac l’eau qu’il largue quelques minutes plus tard directement sur le feu. Cette scène est tellement forte et présente, l’avion jaune devenu tellement emblématique, qu’ils occultent totalement tout un pan des tactiques et techniques utilisées pour lutter contre les feux dans le reste du monde, mais aussi dans notre pays.
En France, CL-415 et Tracker constituent l’ossature des moyens aériens de lutte contre les feux de forêts. Deux avions, deux méthodes et une complémentarité évidente, même si le second souffre d’un déficit de notoriété publique.
Un peu d’histoire
L’utilisation d’avions pour lutter contre les feux de forêts remonte aux années 20 où certains aviateurs aventuriers américains commencèrent à larguer quelques sacs remplis d’eau sur les feux, sans grande réussite. Au Canada, des essais de largages furent effectués en 1944 à partir d’un hydravion Norseman mais le délestage se faisant par des tuyaux assez étroits, 7,62 cm de diamètre, l’efficacité ne fut pas au rendez-vous non plus.
Ce n’est qu’au début des années 50 que l’intérêt pour les aéronefs de lutte contre les feux de forêts fut relancé. Lors d’un essais en vol du prototype de l’avion de ligne Douglas DC-7 au dessus de l’aérodrome de Palm Springs en Californie, en 1953, l’équipage se délesta des 5 à 6000 litres de ballast destinés à simuler la charge utile de l’appareil. Ils mouillèrent visiblement une surface respectable pendant quelques minutes en dépit d’une forte chaleur et d’un faible taux d’humidité ambiante. Le 2 décembre suivant, le DC-7 procéda donc à un nouveau largage de 2400 gallons (9084 litres) sur le Rosemond Dry Lake à Los Angeles en présence des pompiers du California Department of Forestry. Même si le largage ne fut pas massif, puisque l’eau fut déversée par des buses de 7 pouces (17,18 cm), les résultats contre de petits foyers allumés pour l’occasion furent considérés comme encourageants. Dès lors, la possibilité de combattre un feu depuis le ciel en larguant massivement un agent extincteur étant établie, les tactiques et les matériels adaptés se développèrent immédiatement.
Ce sont les essais en vol du DC-7 qui ouvrirent l’ère des avions de lutte contre les feux. A noter que des quatre types d’avions Douglas représentés sur cette photo, trois (DC-3, DC-4 et DC-7) ont encore des exemplaires encore actifs comme pompiers du ciel ! (Photo : Douglas Aircraft Company)
Les écopeurs
Au Canada, la topographie des zones à risques ouvrait la perspective d’utiliser massivement de l’eau pour éteindre, ou au moins, ralentir la progression des sinistres en la prélevant directement dans les plans d’eau innombrables grâce à des hydravions spécialement équipés. Dans un premier temps, l’eau était pompée jusqu’au réservoir alors que l’avion se trouvait à l’arrêt sur le plan d’eau, mais rapidement, pour gagner du temps, l’hydravion procéda en écopant. Maintenu en mouvement à la surface d’un lac ou d’un étang, l’avion prélevait l’eau grâce à sa vitesse et par le biais d’ouvertures situées au niveau de sa ligne de flottaison. Cette méthode, qui demande quand même une grande rigueur de pilotage, fit rapidement la démonstration de ses possibilités.
L’écopage vu par un maître du cinéma, Steven Spielberg, pour l’inoubliable scène d’ouverture de son film « Always » (1989)
Les premiers bombardiers d’eau, en dépit de leurs capacités d’emport réduites, pouvaient multiplier les largages et obtenir des résultats visibles. Les premiers Beaver emportaient quelques centaines de litres.
Le premier Beaver construit a connu une longue carrière de bombardier d’eau au Canada. Il est désormais préservé au Musée de Sault-Ste-Marie dans l’Ontario. (Photo : CBHC)
Ils furent rapidement épaulés par des Catalina qui emportaient jusqu’à 5000 litres. Dès 1961, alors même que le concept d’avions écopeurs n’était en usage que depuis quatre ans, la Colombie Britannique employa un premier Martin Mars, hydravion géant récupéré en surplus auprès de l’US Navy, qui intervint cet été-là très efficacement contre plusieurs feux grâce à une capacité d’écopage de 27 000 litres, un record à l’époque.
En service pendant un demi-siècle ces avions ont très longtemps été les appareils disposant de la charge utile la plus impressionnante. Désormais à la retraite, l’avenir des Martin Mars est encore incertain. (Photo : J. Selman)
En 1963, la France, par proximité culturelle et surtout topographique, le sud de notre pays ne manquant pas de lacs, étangs et littoraux abrités, tout à fait écopables, se dota de ses premiers Catalina, basés à Marseille.
Un Catalina à Marseille dans les années 60. Certains détails indiquent clairement que ces avions pouvaient aussi être remplis au sol avec du retardant. C’est de là que le nom « Pélicandrome » tire son origine, « Pélican » ayant été alors choisi comme indicatif radio de ces avions.
A cette même époque, les ingénieurs de Canadair commencèrent à travailler sur un projet d’avion spécialisé capable d’écoper un peu plus de 5300 litres. Le CL-215 entra en service en 1969 et se montra rapidement parfaitement adapté à sa mission. En France, le désormais célèbre « Canadair » prit alors la succession des Catalina de la Protection Civile et imposa alors son image d’avion providentiel. Il en fut de même en Espagne, en Italie ou en Grèce, où le successeur à turbopropulseurs, le CL-415 trouva aussi sa place.
Une des deux écopes d’un CL-415. En dépit d’une taille réduite, elles permettent à cet avion de recharger les quelques 6000 litres de sa soute en une douzaine de secondes seulement. Redoutable de simplicité et d’efficacité. (Photo : Aliano43)
Eau et émulseur contre les flammes
L’eau larguée sur un feu agit de plusieurs façons. En imbibant le combustible elle diminue très légèrement sa sensibilité au feu et freine un petit peu sa propagation. En s’évaporant ensuite, elle fait diminuer la température et donc réduit l’énergie du sinistre. En étant larguée d’un aéronef, elle emmagasine aussi de la vitesse, de l’énergie potentielle, qui lui donne un effet de souffle qui modifie l’équilibre chimique et physique du comburant et agit ainsi notablement sur cet autre pan important du triangle du feu.
Image emblématique, bien que restrictive, de la lutte aérienne contre les feux de forêts, un largage d’eau depuis un Canadair, ici un CL-215T de l’aviation militaire espagnole, directement contre les flammes.
Le triangle du feu. Leçon numéro 1 du premier jour chez les pompiers. Supprimer, isoler ou réduire un des pans, c’est vaincre un feu.
En agissant ainsi sur les trois côtés du triangle du feu, l’eau fait la démonstration de ses incroyables capacités à éteindre les flammes. Ces avantages sérieux s’additionnent à la nature même de l’eau qui, dans de très nombreux endroits, est facile d’accès et pratiquement gratuite.
Mais l’eau n’est efficace vraiment qu’en effet immédiat. Elle n’est donc utilisable qu’en attaque directe en frappant les flammes. C’est pour cela que, très souvent, elle est utilisée additionnée à de l’émulseur pour obtenir un largage dit « au moussant ». A bord d’un CL-415, 300 litres d’émulseur peuvent être utilisés, ce qui autorise une vingtaine de largages.
A bord du CL-215 Pélican 23 préservé au Musée de l’Air du Bourget, les réservoirs additionnels de moussant, improvisés après la mise en service de l’avion, sont toujours à poste.
La mousse se comporte comme un film qui emprisonne des bulles d’air et qui, sous l’action de l’air, et aussi du feu, se dégrade et libère cet air. Cette couche épaisse et qui s’évapore plus longtemps que l’eau pure a deux actions. Elle isole le combustible du comburant et en se décantant, imbibe légèrement le combustible et améliore quelque peu ses capacités à résister à la pyrolyse pendant un temps largement supérieur à l’eau pure. Avec également la présence de tensio-actifs, donc d’agent « mouillant », la mousse recouvre plus efficacement les végétaux ce qui renforce aussi son action. Ce type de produit était autrefois appelé « retardant court terme » mais cette dénomination semble être tombée en désuétude désormais.
Mais les avions écopeurs n’ont pas que des avantages. Sur le plan opérationnel, les avions amphibies, à l’exception du jet Beriev 200, sont plus lents que leurs homologues terrestres. Un FireBoss aura du mal à dépasser les 150 kt, ce qui est la vitesse de croisière d’un CL-415 tandis qu’un Tracker vole sans problème à 200 kt et qu’un Dash 8Q400MR dépasse largement les 350 kt en croisière. Donc, plus le sinistre est éloigné d’un plan d’eau écopable et plus les tankers (1) ont leur raison d’être, d’autant plus que, bien souvent, ces derniers disposent d’une charge utile supérieure.
Les hydravions et avions amphibies sont aussi peu fréquents et d’une exploitation spécifique. Les types disponibles sur le marché de l’occasion sont peu nombreux et les avions encore en production très rares. Deux d’entre eux sont spécifiquement produits pour combattre les feux, le Beriev 200 en Russie et le Fire Boss chez Air Tractor aux USA.
Roll-out d’un nouveau Beriev 200 au printemps 2016, marquant le retour en production d’un avion qui n’a pas encore rencontré le succès escompté, en dépit de performances alléchantes. (Photo : Marina Lystseva)
Ces appareils ont donc un coût d’achat élevé pour leur catégorie, surtout si on le compare à celui d’un appareil terrestre équivalent… d’occasion puisque tous les autres appareils sont des conversions à partir de machines de seconde main. A titre d’exemple, un Beriev 200 est annoncé à un prix d’achat supérieur à 30 millions $ tandis qu’un DC-10 d’occasion avec un bon potentiel restant n’en vaudrait plus que… 5 !
Appareil spécifiquement construit pour lutter contre les feux, le FireBoss ne peut cacher sa filiation avec la famille d’avions agricoles qui a fait la renommée de son constructeur.
Les coûts d’exploitation sont difficiles à comparer mais il est de notoriété publique qu’un avion amphibie est coûteux à exploiter. Sa rareté rentre en ligne de compte mais aussi toute la surveillance et les réparations à effectuer avec une plus grande précaution en raison de la corrosion consécutive à sa proximité de l’eau, encore plus quand l’eau est salée.
Ainsi, les rapports parlementaires français expliquent que les coûts d’exploitations des CL-415 de la Sécurité Civile sont comparables à ceux des Q400MR dont les performances sont bien supérieures. Pour le Forest Service, les coûts de location parlent d’eux mêmes. Pour la saison 2016 ces tarifs étaient les suivants :
P2V Neptune, 7 570 litres : 18 000 $ par jour + 8 495 $ par heure de vol.
DC-10, 35 600 litres : 35 000 $ par jour + 13 600 $ par heure de vol.
CL-415, 6 056 litres : 54 246 $ par jour + 9 247 $ par heure de vol.
Avec un contrat de location à 54 246 $ par jour et 9 247 $ par heure de vol, le CL-415 Tanker 260 est l’avion le plus couteux de la flotte du Forest Service, bien plus même que les DC-10 ! (Photo : J. Dunn)
Le CL-415, qui était basé près du Lac Tahoe, à la frontière entre le Nevada et la Californie, était donc l’aéronef le plus coûteux de tous les appareils sous contrat. Des éléments techniques expliquent sans doute ce prix, mais les tarifs du Forest Service étant le résultat de négociations particulières avec les entreprises concernées, des explications non rationnelles peuvent avoir aussi joué dans ce prix à la journée tout à fait étonnant.
Les tankers
Dans de nombreux secteurs géographiques, l’eau n’est pas disponible en quantité. Il existe des espaces où il est plus facile de trouver un aérodrome qu’un plan d’eau écopable, en particulier aux USA et, donc, où le recours aux tankers, c’est à dire à des avions conventionnels convertis, devient plus logique.
Dans ce pays, l’expérience menée avec le DC-7 en décembre 1953 ouvrit la porte à un véritable foisonnement d’expérimentations en tous genres. En première ligne on retrouvait alors les avions agricoles et leurs pilotes pour qui, larguer de l’eau sur des feux ne les changeait pas trop de leur activité habituelle d’épandage de pesticides ou d’ensemencement.
Sur l’aérodrome de Willows en Californie, une plaque commémorative rappelle que c’est ici que tout a commencé…
L’expérimentation opérationnelle débuta à partir de Willows en Californie en 1955 avec le Stearman immatriculé N75081. Une véritable escadrille naquit ensuite mais les avions utilisés, n’avaient qu’une capacité d’emport de 170 gallons (643 litres), pas assez décisive.
Le Tanker 1, un avion historique. On est encore loin des avions superlatifs des années 2000… (Collection T. Chavez)
Très vite, les opérateurs, sentant qu’il y avait là un marché à prendre et des contrats à obtenir avec les collectivité locales, se sont intéressés aux avions survivants de la Seconde guerre mondiale stockés depuis la fin du conflit en attendant d’être ferraillés. B-17 Flying Fortress, A-26 Invader, B-25 Mitchell, F7F Tigercat ou PB4Y Privateer ont ainsi fait les beaux jours des entreprises de travail aérien américaines impliquées dans ce combat.
Le B-17, vétéran de la Seconde guerre mondiale, a été aussi un tanker respecté pour ses excellentes qualités de vol et sa fiabilité. Le Tanker 61 a été photographié à Long Beach en septembre 1968. Il est aujourd’hui préservé au statique au Castle Museum sous les couleurs du Virgin’s Delight. (Photo : René J. Francillon)
Les derniers TBM en service appartenaient à Forest Protection Ltd au Canada. Ils ont été remplacés par des Air Tractor au milieu des années 2000 ! (Photo : Forest Protection Ltd)
La disponibilité de ces avions et leur faible coût d’achat, ainsi que leurs charges utiles respectives en ont fait des appareils très prisés aux USA, mais aussi au Canada. Ce sont toutefois les TBM Avenger qui furent parmi les plus nombreux puisqu’on estime à environ 150 exemplaires différents qui participèrent à des missions de lutte contre les feux de forêts à un moment ou un autre. Cette imprécision est la conséquence de l’activité mixte de ces avions, pouvant parfois passer d’une utilisation purement agricole à une utilisation pompier par le seul changement du produit délivré.
Aujourd’hui encore, les tankers sont le fruit de conversions d’avions d’occasion, anciens militaires mais aussi, désormais, de jets de ligne délaissés par les grandes compagnies aériennes. Le faible coût d’acquisition de ces machines laisse une marge pour financer la transformation et maintenir l’équilibre financier de ces entreprises qui sont, bien souvent, économiquement prisonnières du Forest Service. Les évènements de 2002 et surtout de 2004, ont clairement montré les limites de ce système.
Si les avions écopeurs utilisent l’eau pour lutter contre les flammes, agent extincteur disponible en quantité et facile d’accès pour ce type d’appareils, les tankers ou airtanker, comme ils sont désignés aux USA, souffrent d’un déficit de productivité puisqu’il leur faut de toute façon retourner sur un aérodrome pour recharger leurs soutes d’agent extincteur. Cette opération peut prendre plusieurs minutes car il faut prendre en compte le temps d’intégration dans le circuit de l’aérodrome, le temps de roulage et celui du remplissage, lié à la puissance des pompes d’alimentation et le temps nécessaire pour repartir. Ce mode opératoire pourrait s’avérer très pénalisant, surtout pour les appareils les plus lourds. Certains, en particulier les DC-10, peuvent toutefois utiliser plusieurs points d’alimentation simultanément ce qui réduit d’autant leur temps d’immobilisation.
Moteurs tournants, ce Q400MR passe au « Pélicandrome » avant une mission d’entraînement. Les pompes débitent environ 1000 litres à la minute. Il faut donc 3 minutes pour remplir un Tracker et un peu moins de 10 pour un Dash.
Pour compenser cette lacune, et parce que l’expérience de l’aviation agricole et ses produits chimiques a largement servi de base au développement de ces nouvelles missions, très rapidement, l’eau seule n’est plus devenue l’arme essentielle de leur combat. Le fait d’avoir à recharger les soutes des airtankers auprès d’installations spécialisées permet d’utiliser des produits plus performants et d’un usage différent de l’eau. Si on n’oublie pas que les premiers tankers furent extrapolés d’avions agricoles spécialisés dans l’épandage de pesticides, et mis en œuvre par des équipages rompus aux opérations des « Crop Duster », il était logique, pour lutter contre les feux, de faire également appel à la chimie.
Le retardant
Dès les premières expérimentations aux USA à Willows au milieu des années 50, les tanker ont utilisé un produit non pas extincteur, mais retardant.
Largage massif d’un Convair 580 canadien aux USA en août 2016. La couleur du retardant permet de repérer facilement les zones déjà traitées. (Photo : InciWeb)
Dans un premier temps, des produits à base de chlorure de calcium, de phosphate de monoammonium ou de borax furent expérimentés, notamment lors de l’opération Firestop en 1955 en Californie. Mais ce sont des solutions à base de borate qui furent utilisées dans un premier temps, offrant à ces avions leur premier surnom « Borate Bombers ». Ensuite, ce fut au tour du phosphate de diammonium. Mais, en 1959 apparaissent deux retardants produits en quantité, le Phos-Chek® à base de phosphate d’ammonium et le Fire Trol® utilisant le sulfate d’ammonium comme principe actif.
Le retardant est un produit efficace mais couteux. Il est néanmoins inoffensif pour la faune et la flore. Il est livré par les industriel sous forme de poudre ou de pré-mélange qu’il faut encore diluer. (Dennis W. Goff/USAF)
Ces deux produits, toujours en usage de nos jours tout en ayant évolué dans leurs compositions respectives, agissent sur la pyrolyse, le mécanisme de dégradation chimique des éléments qui en fracturant les liaisons atomiques permet l’apparition des flammes. En recouvrant les végétaux, le principe actif du produit retarde la décomposition de la cellulose qui constitue l’essentiel de la structure des végétaux, dont le bois. Alors que la cellulose se décompose à 150°C et brûle, le retardant offre aux végétaux une protection suffisante pour qu’il soit nécessaire d’atteindre des températures beaucoup plus élevées (certaines sources avancent la température de 700°C) avant que cette décomposition chimique n’intervienne. Le gain de temps se trouve là.
Patch d’équipage de Tanker. Tout est dit. (Collection J. Laval)
Si le retardant n’est pas exposé au feu, il conserve ses propriétés même si l’eau qui compose encore 80% du produit déversé s’est évaporée. Ses propriétés se dégradent ensuite progressivement et en fonction de son exposition au vent et à la pluie.
L’efficacité du retardant repose aussi sur son homogénéité et sa répartition au sol. Les soutes à flux constant qui permettent d’adapter la densité du largage au type de végétation sont alors extrêmement utiles. Depuis quelques années, des expérimentations sont même faites pour repérer la position des largages par GPS afin que les largages suivants soient parfaitement positionnés pour ne laisser aucun trou dans la barrière ainsi posée.
Le retardant conserve ses propriétés jusqu’à ce que le vent et la pluie nettoient la végétation qu’il a protégé. Sur les feux de prairie, comme ici dans le Montana, il est d’une efficacité aussi redoutable qu’indéniable. (Photo : Montana DNRC)
Le retardant peut être utilisé en largage direct sur les flammes où il aura une action très proche de celle de l’eau. Largué en amont du front de flammes ou sur les flancs, il servira en revanche de barrière d’appui. Les applications de ces produits spécifiques sont plus variées que l’eau, ce qui compense largement les délais plus importants qu’il peut exister entre deux largages par un même aéronef.
De très nombreux largages ont été nécessaire pour bloquer ce feu, mais les dégâts sont restés très limités. Le retardant en application indirecte, ça marche ! (Photo : Cal Fire)
Le retardant est donc un produit terriblement efficace puisque spécifiquement conçu pour cet usage. Mais cette efficacité a aussi un coût. En 2014, chaque gallon de retardant largué par les avions en contrat avec l’US Forest Service a coûté aux contribuables US la somme de 2 $. Cette année là, 9 millions en ont été utilisés, soit un budget de 18 millions de dollars sur la saison.
Largage spectaculaire d’un DC-10 dans le Silverado Canyon (CA) en 2014. Exemple typique de largage indirect destiné à construire ou consolider une barrière de retardant dans une zone difficilement accessible aux véhicules pompiers et aux bulldozer.
D’autres coûts sont à prendre en compte comme celui des installations spécialisées sur les aérodromes, qui peuvent être fixes ou mobiles, et le coût du personnel en charge de les entretenir et de les activer. Mais là encore l’engagement de ces moyens est rarement fait au hasard.
Les Air Attack bases sont réparties sur l’ensemble du territoire californien. Ici celle de Chico, au nord de Sacramento.
Les voilures tournantes
Les avions, aéronefs à voilures fixes, ont donc, en fonction de certaines caractéristiques propres, des modes d’engagement différents. Ils sont souvent complétés, épaulés ou suppléés par les hélicoptères, qui, bien que plus discrets, n’en sont pas moins les aéronefs les plus utilisés contre les feux de forêts à l’échelle mondiale. Depuis les années 60, les hélicoptères légers, moyens ou lourds, ont réussi à trouver une place tout à fait particulière dans ce domaine.
Les HBE du Var en opérations depuis le lac du barrage du Revest dans l’arrière pays Toulonnais en août 2016. Ce sont des auxiliaires précis et efficaces et qui peuvent utiliser les plans d’eau inaccessibles à d’autres aéronefs.
Leur mode opératoire les place d’emblée dans la catégorie des écopeurs puisqu’ils peuvent prélever leur charge utile dans n’importe quel point d’eau même inaccessible autrement. Cette facilité d’emploi les rend indispensables sur feux d’autant plus qu’il peuvent aussi venir s’approvisionner en retardant si on leur offre cette possibilité avec des installations mobiles que les pompiers peuvent installer rapidement à proximité immédiate de la zone des opérations.
Les hélicoptères peuvent tout à fait opérer avec du retardant. Des installations provisoires et mobiles peuvent être installées à proximité des zones d’opérations. (Photo : Phos-Chek)
Même si leur vitesse est moindre que celle des voilures fixes, les hélicoptères compensent en opérant encore plus près du front. Si on peut s’étonner de ne pas voir d’avions écopeurs massivement en service aux USA, en Australie ou dans certaines provinces du Canada, c’est là qu’il faut trouver la réponse.
Les CH-47 obtenus auprès de l’US Army sont de plus en plus fréquents sur feux comme cet exemplaire en opérations sur le Tokewanna Fire en 2016. (Photo : InciWeb)
Dans ces régions où les points d’eau écopables sont rares, ce sont les HBE qui assurent la fonction de frappe massive avec un succès indéniable, d’autant plus que les sources d’approvisionnement utilisables peuvent quand même être nombreuses ou peuvent être acheminées mécaniquement par les pompiers ou les forestiers. Souvent, ces machines ont des capacités importantes, les hélicoptères lourds CH-47 ou CH-54 pouvant embarquer une dizaine de tonnes d’eau ou de retardant.
Largage à l’eau, au moussant ou même au retardant, les feux de forêts sont l’occasion de montrer la très grande polyvalence des hélicoptères.(Photo : Erickson Aircrane)
C’est donc aussi un des facteurs contributifs à la raréfaction des amphibies puisque leurs missions peuvent être assurées en partie par des voilures tournantes pour peu qu’elles soient prépositionnées idéalement pour éviter les longues liaisons. Les coûts des appareils sous contrat avec l’US Forest Service permettent de voir que les tarifs appliqués en 2016 aux voilures tournantes ne sont pas très éloignés des tarifs appliqués aux avions de même catégorie et de même capacité. Mais à la différence de nombreux tankers, les voilures tournantes ont l’insigne avantage d’être véritablement polyvalentes et être utilisables pour une large variété de missions dès que la saison des feux se termine.
CH-47D, 10 348 litres : 24 500 $ par jour + 7 394 $ par heure de vol
CH-54B, 10 319 litres : 22 150 $ par jour + 3 987 $ par heure de vol
S-70A, 5550 litres : 15 000 $ par jour + 3 933 $ par heure de vol
Les hélicoptères équipés d’un bambi-bucket sous élingue se transforment en quelques secondes en HBE efficaces et précis, capables de puiser l’eau dans des endroits incongrus comme ici dans la piscine de la base navale de l’US Navy à Naples lors d’un feu en 2004, ce qui permit alors d’abaisser le temps de rotation des machines à seulement 60 secondes. (Photo : Stephen Woolverton/ US Navy)
La Loi du nombre
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les avions écopeurs sont loin d’être majoritaires dans l’ensemble des flottes consacrées à lutter contre les feux de forêts. Ils ne l’ont d’ailleurs jamais été. Dès les origines du concept, les avions agricoles ont été les plus nombreux. Avec la famille des AgCat, des Thrush et des Air Tractor, ces avions restent très bien représentés mais depuis, les hélicoptères les ont supplantés. Seulement une poignée de types d’avions amphibies ont été utilisés pour ces missions ; Beaver, Otter, Twin Otter, Catalina, CL-215, CL-415, Beriev 200, FireBoss. Avec 221 exemplaires produits (125 CL-215 et 96 CL-415), la famille Canadair est la plus nombreuse.
A côté de ça, la liste des tankers comporte plus d’une trentaine de types principaux dont certains, comme les TBM, les B-17, les Lockheed Electra, les Neptune, les B-25, les S-2 Tracker, les C-130, les P-3 Orion, sans oublier les quadrimoteurs Douglas, ont compté parfois des dizaines d’exemplaires convertis. La représentation populaire de l’amphibie attaquant les flammes est donc spécifique aux zones géographiques où ces appareils sont effectivement parfaitement adaptés mais elle est loin d’être généralisée à l’échelle de la planète.
Contrairement aux idées reçues, les avions capables d’écoper sont loin d’être les plus fréquents en opérations contre les feux de forêts. Les avions agricoles, les hélicoptères, mais aussi les tankers, à l’échelle mondiale, sont bien plus répandus. (Photo : Beriev)
L’argumentaire simpliste et tellement autocentré faisant du Canadair la panacée au problème des feux de forêt ne doit cependant pas masquer plusieurs points essentiels. Là où les écopeurs amphibies disposent de la topographie adaptée, ils sont presque irremplaçables. Ailleurs, leur rôle d’attaque massive et répétée peut être parfaitement assumé par les voilures tournantes. Si on en juge par la situation française, l’usage conjoint et parfaitement organisé de ces différents moyens, bien utilisés en fonction de leurs qualités propres donne des résultats remarquables mais ce modèle ne peut pas être universel tant la topographie du pourtour septentrional de la Méditerranée, et en particulier le sud de notre pays, est idéale. La topographie aux USA explique la domination des tankers mais il ne faut alors pas oublier que les missions assurées par les CL-415 chez nous, le sont par des hélicoptères lourds, là bas.
Écopeurs et tankers ont donc leurs propres raisons d’être. Il est compliqué de démontrer que tel matériel et telle doctrine sont supérieurs à d’autres tant les contextes géographiques et économiques diffèrent d’un pays à l’autre, même d’une région à l’autre. Une étude objective des avantages de chaque moyen ne peut arriver qu’à une seule conclusion juste ; ces moyens s’épaulent mutuellement. Si ces deux principes cohabitent sur feux depuis plus de 60 ans, ça ne peut être un hasard !
L’avenir des avions de lutte contre les feux de forêts est désormais incarné par les jets, comme ce RJ-85 capable d’acheminer à grande vitesse plus de 12 tonnes de retardant. (Photo : Country Fire Authority)
Plus que leurs capacités d’emport, la différenciation opérationnelle des moyens aériens repose sur la dualité « écopeur » contre « tanker » car les manières d’approvisionner ces vecteurs déterminent aussi les types d’armes et les manières de les utiliser, et donc leur pertinence et leur efficacité. Fondamentalement, ces deux principes de base ont du mal à se substituer et bien au-delà, il peuvent être aussi, et c’est là une notion véritablement essentielle, complémentaires.
(1) Tanker est un mot très générique puisqu’il désigne tout autant les pétroliers que les avions ravitailleurs en vol. Il sert pourtant d’indicatif radio pour les avions aux USA, c’est pour cela que nous l’avons conservé. Le vocable le plus adapté pour les désigner dans notre langue serait « avion bombardier à retardant » (ABR) par opposition à « avion bombardier d’eau » (ABE).
Tout l’équipe est heureuse de vous présenter le troisième épisode de cette saison.
Les habitués de ce blog reconnaîtrons facilement l’article « Tank Story » puisque c’est une adaptation de l’article « Les systèmes d’armes des bombardiers d’eau » publié sur 09-27 l’an dernier.
« Une guerre qui s’est perdue sans doute Entre Biarritz et Knokke-le-Zoute, C’est une statue sur la grand place. Finalement la terreur, Ce n’est qu’un vieux qui passe. »
Michel Sardou, Verdun, 1979
Peut-on oublier Verdun ?
Du 21 février au 19 décembre 1916, 300 000 morts, 400 000 blessés, une terre dévastée qui porte encore en elle les traces de ces combats et les cendres de centaines de combattants. On imagine mal ces affrontements faits de préparations d’artilleries et d’assauts vains, dévoreurs de vies. La boucherie au sens le plus strict du mot. Les survivants en étant parfois si marqués qu’ils ne pouvaient en parler, aucun mot n’étant assez fort. La terreur, ce n’était qu’un vieux qui passe. La terreur, elle était dans le souvenir des survivants.
Verdun est, sur un plan militaire, un tournant de l’histoire de la guerre contemporaine car Cette bataille marque le moment où les armées entrent véritablement dans le 20e siècle. Dans les différentes commémorations qui ont émaillé cette année souvenir, l’aviation, il faut bien le dire, a été la grande absente. Ce n’est pas totalement choquant si on compare les pertes des troupes au sol et les pertes des aviateurs sur ce secteur.
Rarissime vue de deux Nieuport en train d’escorter un appareil de reconnaissance. (Photo : Les Arts Décoratifs, Paris /Jean Tholance)
Pourtant, c’est à Verdun que l’aviation de guerre est véritablement née. Jusqu’alors, les aéroplanes avaient une fonction essentielle, aller voir de l’autre côté des lignes ennemies afin de faciliter les décisions stratégiques et les choix tactiques. Du coup lorsque cette guerre est devenue statique et coûteuse en vie humaines, il a fallut chasser ces espions aériens. Jusqu’en 1916, la chasse française était un système peu organisé, même si des unités avaient déjà commencé à se spécialiser avec une certaine efficacité. Mais la qualité de leur action relevait bien souvent de la dextérité individuelle et de l’instinct des aviateurs. Le temps du combat aérien singulier et solitaire se terminait alors, même si certains ont longtemps continué à le pratiquer, c’était désormais le temps des escadrilles, des tactiques de groupe, de la maîtrise du ciel. L’arme aérienne débutait alors une véritable mutation, une maturation dont l’aviation militaire moderne est aujourd’hui l’aboutissement.
Le Commandant de Rose a donc été chargé d’organiser la chasse pour rendre aveugle les troupes du Kaiser et pour cela il fallait des avions, des pilotes, des escadrilles. Il rassembla des unités spécialisées dans le secteur de la bataille terrestre et leur imposa une tactique collective exigeante, agressive ne laissant que peu d’opportunités aux appareils ennemis d’effectuer leurs missions d’observation. Et la tactique fonctionna. Comme l’avait demandé le Général Pétain, le ciel avait été balayé, l’adversaire était temporairement aveugle, mais les combats ne faisaient que débuter.
Charles de Rose à bord de son Nieuport en 1916. Après avoir offert à la chasse française ses premiers grands succès grâce à une tactique très agressive, il retourne en état-major. Il se tue accidentellement en mai près de Soissons. (Photo : Service Historique de la Défense)
Le Musée de l’Air propose à partir d’aujourd’hui une exposition temporaire consacrée à la Guerre Aérienne dans la bataille de Verdun. Dans un espace d’environ 400 m2 dont l’accès se fait par la Grande Galerie, l’ancienne aérogare temporairement et partiellement fermée en raison des importants travaux de réhabilitation qui s’y déroulent, environ 170 pièces originales et documents ont été rassemblés et organisés par les équipes du Musée afin de raconter et d’expliquer les enjeux de cette bataille dans les airs.
La pièce maîtresse de l’exposition est bien sûr le Nieuport XI, le chasseur, agile et rapide qui a permis aux ailes françaises de reprendre la suprématie du ciel aux monoplans Fokker au début de la bataille. Cet avion porte d’ailleurs les couleurs de la monture du Commandant de Rose.
Avec ses 480 kg en ordre de marche, son moteur de 80 ch et une vitesse de décrochage inférieure à 65 km/h, le Nieuport XI aurait presque pu entrer aujourd’hui dans la catégorie des ULM de classe 3 « Multi-Axes », à 7,5 kg près…
Autour du « Bébé » Nieuport, des vitrines présentent des uniformes authentiques, des armes, des obus mais aussi quelques documents exceptionnels comme le journal de marche et des opérations de l’escadrille N65 qui compta dans ses rangs Charles Nungesser à partir d’octobre 1915..
Le JMO de l’escadrille N65 prêté par le Service Historique de la Défense.
L’obsession du renseignement, la nécessité de l’observation des installations et de l’organisation adverse, est particulièrement mis en lumière dans cette exposition, ce qui reflète les véritables enjeux de cette bataille aérienne. Au centre de la pièce, une authentique carte du front, annotée avec une précision incroyable grâce aux observations des aviateurs, illustre parfaitement cette situation. Une frêle nacelle d’observateur d’un train de cerfs-volants, puisque les ballons et les avions n’étaient pas les seuls moyens employés, est d’ailleurs exposée à côté d’une maquette qui permet de comprendre en un coup d’œil la complexité de la mise en œuvre de ce système incroyable.
Canevas de Tir, Verdun, 29 Mars 1916. Extrait. Le document original, où les positions allemandes et les batteries d’artillerie sont reportées avec une grande précision, mesure 105 cm sur 75. (Document : Service Historique de la Défense)
D’autres thématiques sont ensuite abordées comme les bombardements aériens et leurs victimes civiles ou le coût humain de la bataille du ciel.
L’évocation des premiers bombardements stratégique se fait par les unes, explicites, de journaux français et allemands.
Verdun est aussi l’émergence de l’aviateur, de l’As, dans l’imaginaire populaire. Portés par la presse qui firent de certains des vedettes, les chasseurs commencèrent à prendre une place médiatique qu’ils conservent encore un peu de nos jours. Navarre fut un d’eux, avec un surnom qui positionne clairement son action : la sentinelle de Verdun. Mais les héros plus anonymes ne sont pas oubliés, ce sont eux qui, collectivement, par leurs actions, ont influencé le sort du combat;
Cette vitrine contient quelques exemplaires de tenues de vol. Il ne fait aucun doute, à les regarder, que le froid était le principal ennemi de l’aviateur.
Une dernière pièce, aussi authentique qu’extraordinaire vient clore ce parcours : une automobile Torpedo Sigma qui fut construite spécialement pour Georges Guynemer en 1916 et aujourd’hui conservée dans un très bel état par le Musée National de la Voiture de Compiègne. Bien sûr, on pourra toujours objecter que le jeune aviateur Guynemer ne vola pratiquement pas au-dessus de Verdun pendant la bataille, son heure de gloire intervenant un peu plus tard, mais 99 ans après sa disparition, il représente bien l’archétype du pilote de chasse légendaire, conscient de la fragilité de son existence et impitoyable en combat, un mythe fondateur né justement au-dessus de Verdun.
La Torpedo Sigma de Guynemer avec laquelle il écuma Paris et ses lieux de perdition en 1916.
Avec cette exposition, qui n’entre pas dans le système de gratuité des collections permanentes du musée, et pour cause puisqu’elle n’est que temporaire, le Musée de l’Air vient compléter l’ensemble des commémorations du centenaire de cette bataille historiquement fondamentale. La muséographie très contemporaine adoptée permet de passer un moment particulièrement instructif grâce à un choix de documents et d’objets originaux particulièrement pertinents.
A noter la parution aux Éditions Pierre de Taillac du livre « Verdun, la guerre aérienne » publié sous la direction de Gilles Aubagnac, chef du service des collections et Clémence Raynaud, conservateur du patrimoine, commissaires de l’exposition. Il reprend et développe les thématiques abordées et une grande partie des illustrations utilisées font partie de l’exposition temporaire.
Autrefois considérée comme une aviation puissante et redoutable au sortir de la guerre qui l’a opposée à l’Iran dans les années 80, l’armée de l’air irakienne a ensuite subi la guerre de 1991. Et lorsque les USA et la Grande-Bretagne envahirent l’Irak en 2003, elle n’était plus en mesure de s’y opposer.
Une fois Saddam Hussein tombé, ce sont sur d’autres bases que la puissance aérienne irakienne a été reconstruite. (…)
En janvier 1910, 7 jeunes officiers issus de l’École Navale sont envoyés suivre des cours de pilotage dans les écoles du constructeur d’avions Farman. Deux d’entre-eux suivent en parallèle des cours au sein de l’école supérieure d’Aéronautique récemment créée. Le 12 septembre suivant un biplan Farman est commandé et livré le 26 décembre.
voici la preuve irréfutable qu’une affiche de meeting aérien pas géniale peut drainer une foule considérable et introduire un spectacle fabuleux. A tout prendre, on préfère ça à un meeting aérien où le seul truc intéressant est l’affiche !
Même si les premiers centres d’aviation navale ne sont ouverts que l’année suivante, on peut, sans mentir, faire remonter l’histoire de l’Aéronautique navale à cette fameuse année 1910 et c’est donc pour célébrer ce centenaire que les 12 et 13 juin 2010, une foule extrêmement nombreuse a été conviée sur la base d’Hyères pour célébrer cet évènement au cours d’un meeting aérien inoubliable, un des plus beaux offerts au public français depuis des années.
Comme il est de coutume désormais, la première journée était réservée aux familles, aux arrivées des avions participants et aux dernières répétitions avant le grand show du lendemain. Quelques dizaines de spotters avaient été admis dans l’enceinte moyennant une somme très modeste. Ayant été un des premiers à réserver sa place, l’auteur de ces lignes a vu sa réservation et son règlement ne pas avoir été être pris en compte ce qui lui a valu son baptême de Tracma pour rejoindre un bureau d’une flottille et un ordinateur relié à internet afin de retrouver l’email de confirmation de la bonne réception du règlement et prouver ainsi cette fameuse réservation. Une péripétie finalement sympathique.
Document de présentation du meeting montrant les zones publiques sur la BAN et les axes de démonstration. Les appareils décollaient et atterrissaient sur la piste 05-23.
Pour célébrer l’anniversaire avec faste, plusieurs appareils avaient reçu une décoration spéciale, certaines vraiment spectaculaires.
Livrée commémorative sur le SEM n°23.
La magnifique décoration du Panther 522 de la Flottille 36F était la plus spectaculaire.
La 4F avait opté pour des marques plus discrètes pour son Hawkeye.
Les visiteurs étrangers, nombreux, n’étaient pas en reste.
Les derniers Breguet Atlantic du Marineflieger sont spécialisés dans les missions ELINT au sein du MFG 3 « Graf Zeppelin » d’où le portrait du célèbre aéronaute sur la dérive du 61+03. Cet avion a été retiré du service et démantelé en 2011.
Après le retrait des Sea Harrier en 2006, la Royal Navy, qui a célébré le centenaire de son aviation en 2009, objet de la décoration de cet appareil, a exploité des Harrier Gr9 au sein du Naval Strike Wing composé des Squadron 800 et 801 jusqu’au retrait du type en 2011.
L’USS Harry S. Truman se trouvait au large et donc le groupe aérien embarqué US était largement et très bien représenté avec plusieurs avions porteurs des fameuses décorations « CAG » (Commander Air Group).
Au large de Hyères, l’impressionnant USS Harry S. Truman, classe Nimitz, avec son groupe aérien complet sur le pont.
Le E-2C 165648 de la VAW-126 porteur d’une décoration simple, mais très efficace.
En charge des missions de transport pour le groupe embarqué, le C-2A 162143 du VRC-40 et sa jolie dérive a été un des participants US à la réussite de ce meeting.
Difficile de ne pas comprendre que ce F/A-18E (166650) appartient à la VFA-105 !
De nombreux warbirds étaient aussi présent. Deux ont retenu particulièrement l’attention. Le premier, le F4U-5 modifié en F4U-7 au début des années 2000, la version spécifique à l’aéronautique navale française, venait d’être vendu en Allemagne. Il faisait ici ses adieux au public français et à son pilote attitré, Ramon Josa. L’autre était le nouveau Focke Wulf 190 de la collection Jacquard, piloté par Marc « Léon » Mathis (1). Lors de la journée spotter du samedi, le Fw 190 a décollé en compagnie du Spitfire de la même écurie pour une répétition de leur démonstration en duo.
Le Focke-Wulf F-AZZJ lors de son ultime roulage.
Marc « Léon » Mathis, à quelques minutes d’une immense frayeur.
Alors que les deux avions évoluaient à proximité de l’aérodrome, le moteur de l’avion allemand s’arrêta brutalement. Trop bas et trop loin de la piste pour tenter de la rejoindre, « Léon » n’eut d’autre solution que de tenter l’amerrissage d’urgence. Un peu sonné par le choc du contact avec les vagues, le pilote ne parvint pas à enlever son harnais alors que l’avion commençait à s’enfoncer. Un pilote de jet ski qui s’est précipité immédiatement vers l’appareil accidenté réussit à sectionner les sangles et à extraire un « Léon » très chanceux (2).
Photo prise au moment de l’impact du Focke Wulf dans les vagues ; l’aviateur a été sauvé par un pilote de jet ski. (Photo : DR)
Retour du Dauphin SP dépêché sur alerte sur le site de l’accident.
La rumeur de l’accident, que personne sur la base n’a véritablement vu, a très vite circulé au sein des spectateurs. Le décollage en alerte du Dauphin SP n’est pas passé inaperçu non plus, mais très vite la nouvelle d’une issue heureuse pour le pilote est venue rassurer tout le monde.
Cependant, les causes de l’accident ne pouvant être établies dans l’instant et afin d’éliminer un problème possible de carburant contaminé, tous les appareils ayant complété leurs pleins avec de l’AvGas provenant de la même citerne que celle utilisée pour l’appareil accidenté, ont été cloués au sol le temps de l’enquête préliminaire et des analyses du carburant. Cette décision, inévitable, a profondément modifié le programme des vols du lendemain, empêchant le Noratlas, le DC-3, le Spitfire, le P-51 Mustang de participer à la fête autrement qu’au statique. Par chance, le F4U-7, basé à Avignon et le TBM Avenger venu de Suisse n’étaient pas concernés.
Victimes indirectes de l’accident du Fw190, le Noratlas et le DC-3 ne participèrent donc qu’au statique à l’évènement.
Le lendemain avait lieu le meeting proprement dit. Entre la météo idéale, une campagne de presse intense, la foule se pressait déjà très nombreuse aux différentes entrées de la base. La nouvelle de l’accident de la veille a aussi offert une vitrine médiatique inattendue à l’évènement et a peut-être aussi drainé une foule de curieux qui, sans ça, auraient vaqué à d’autres occupations.
Le programme publié ne manquait pas d’être alléchant mais l’incertitude régnait sur les appareils qui allaient vraiment pouvoir voler. En attendant le début du meeting, ce sont les avions des aéro-clubs de la région et les hélicoptères d’Aviaxess qui tournaient pour d’innombrables baptêmes de l’air.
l’évocation de cent ans d’aéronautique navale commença ensuite.
Premier à prendre l’air, le Bleriot XI-2 type Pégoud symbolisait les premiers avions militaires français. Il fut suivi par un JU-52, un très rare et très élégant, Stinson 108-3, un Storch puis un Stampe.
Joli représentant de l’aviation légère de l’immédiat après guerre, ce Stinson 108 immatriculé en France est porteur de la livrée d’un appareil de l’ELA 52 basé en Indochine en 1951.
Puis vint le premier grand moment d’émotion. Récupéré pendant les années 90, ce F4U-5 fut restauré au Castellet et modifié pour ressembler exactement aux F4U-7 de l’Aéronautique navale. Pendant une décennie, il fut une vraie vedette des meetings aériens en France, généralement présenté en vol par Ramon Josa, légende vivante de l’aviation embarquée française. Quelques semaines avant le meeting d’Hyères, l’avion a été vendu en Allemagne mais les nouveaux propriétaires ont laissé leur nouvel appareil participer sous ses couleurs habituelles à ce grand meeting. Toute autre décision aurait laissé un goût amer à tout le monde.
Pour son pilote, ce fut aussi, sûrement, un grand moment d’émotion puisque c’était la dernière fois qu’il présentait ce type d’appareil en vol, mettant ainsi un terme à une histoire commencée à la fin des années 50 lorsque le jeune marin eut la chance de voler sur les derniers Corsair de l’aéronautique navale française.
Parce que c’était sa dernière démo et parce que plusieurs autres warbirds étaient cloués au sol, Josa bénéficia d’un créneau horaire assez large qu’il mit à profit pour effectuer sa démonstration habituelle, et comme il restait du temps et du carburant à la fin, d’enchaîner les passages rapides et les manœuvres simples pour occuper l’espace et en profiter une ultime fois. Il y a des moments, rares, où on sent que le pilote, en se faisant plaisir, en donne tout autant à ses spectateurs. C’était le cas ce jour-là !
A l’instar de Stephen Grey en Spitfire à la Ferté-Alais quelques jours plus tôt, Ramon Josa a véritablement donné des frissons de plaisir à ses spectateurs à bord de son F4U-7 et en jouant les prolongations.
Dernier vol sur une machine totalement mythique pour un pilote d’exception.
Ramon a ensuite ramené l’avion au parking, a coupé le moteur et est descendu de son destrier avec sans doute une énorme émotion.
Ramon Josa, légende vivante de l’aéronautique navale française.
Basé en Suisse, le « Charlie’s Heavy » faisait, à Hyères, une de ses premières sorties. Il a été récemment repeint aux couleurs américaines.
Et puisque nous étions en plein dans la thématique « métal hurlant », ce fut au tour de l’Avenger « Charlie’s Heavy » de décoller, suivi par un très rare Nord 1101 Noralpha, un Messerschmitt 208 produit en France après guerre.
Rarement présenté en meeting, le Noralpha n’en est pas moins un avion qui a compté dans la renaissance de l’industrie aéronautique française après la guerre.
Ce fut ensuite le tour de la Patrouille de France d’occuper le tableau. En faisant évoluer les Alpha Jet tricolores en milieu d’après-midi plutôt qu’en fin de programme, les organisateurs des meetings aériens profitent du départ des curieux venus que pour elle pour réduire un peu le grand rush de fin de meeting. Mais surtout, une fois les avions posés et parqués, les pilotes et les mécaniciens peuvent passer la fin de l’après-midi à faire des relations publiques, à signer des autographes, à multiplier les interventions sur le car podium et surtout, à être présent sur leur stand de produits de tradition dont le chiffre d’affaires peut alors exploser.
En 2010, la PAF avait surtout l’originalité d’être dirigé par le Commandant Virginie Guyot, première femme à diriger ainsi une patrouille acrobatique.
Le Cdt Virginie Guyot à bord de l’Alpha Jet leader. Alors qu’on la pensait promise à une belle et longue carrière, avec en ligne de mire les étoiles de Général, Virginie Guyot a quitté l’armée de l’Air en 2015.
Le programme s’est poursuivi avec une démo combinée, MS760 Paris et CM-175 Zéphyr, deux avions qui ont été en service dans la Marine, l’un pour les liaison et les vols d’entraînement, l’autre pour la formation avancée des pilotes embarqués. Ces deux appareils partagent l’insigne honneur d’être propulsés par des Turbomeca Marboré, des réacteurs qui ont la particularité d’avoir un bruit particulièrement strident ; certains disent même qu’ils représentent les systèmes les plus efficaces pour transformer du kérosène en décibels. Néanmoins, ces deux appareils, mis en œuvre par des associations de grands passionnés, demeurent deux élégants voltigeurs.
Le « Paris » et le « Zéphyr » partagent plus que leur motorisation. Les présenter en vol de concert était une idée évidente.
Aux commandes du Zéphyr se trouvait à nouveau Ramon Josa, qui, à peine remis de ses émotions, a enchaîné avec une démonstration à bord d’une autre de ses montures historiques.
Passage en poursuite pour deux monuments de l’histoire l’Aéronautique navale.
Le Zéphyr se distingue de son cousin Magister par sa verrière coulissante qui permettait les opérations d’appontage et de catapultage verrière ouverte pour faciliter l’évacuation de l’appareil en cas de problème, en absence de sièges éjectables. Autre signe distinctif : le bout de la crosse d’appontage est visible à l’extrémité arrière de l’appareil.
C’est ensuite que le bruit et la fureur ont fait leur apparition.
En 2010, l’armée de l’Air avait confié le Rafale Solo Display à « Rut »… Et de mémoire de spotter, c’était une bonne idée ! Parce que le garçon s’y entendait pour « envoyer du bois » ou « poutrer sévère » ! D’autant plus qu’évoluant en atmosphère humide, bord de mer oblige, le Rafale voyait ses fumigènes complétés par de superbes traînées de condensation. Spectacle total sur fond de ciel bleu.
Fumigènes et traînées de condensation, la totale pour souligner les trajectoires parfois violentes suivies par le Rafale en démonstration.
Retour sur terre après une vingtaine de minutes de show et quelques centaines de kg de kéro transformés en bruit et en fureur.
Après avoir laissé les avions français du groupe aérien embarqué décoller pour la mise en place de leur démonstration combinée, un Matador de l’aviation espagnole a effectué une démonstration impressionnante.
La marine espagnole utilise des AV-8B Harrier sous la désignation EAV-8B Matador depuis la fin des années 80. Ces appareils devraient rester en service encore une dizaine d’années.
En stationnaire, le Harrier est terriblement bruyant, il fume aussi beaucoup. Tout pour plaire !
Les capacités hors-normes du Harrier sont faciles à mettre en avant. Après quelques manœuvres aériennes classiques, il suffit au pilote de le mettre en stationnaire pour frapper à jamais la foule. Un peu de translation latérale, une petite marche arrière et surtout, une immobilité presque parfaite et le Harrier aura montré son point fort évident. C’est ce que le pilote espagnol a bien compris.
Le public présent aura du mal à oublier cet avion comme figé au-dessus de la piste et surtout le bruit énorme qu’il émettait alors. A l’opposée totale des démonstration de virtuosité aérienne, l’immobilisme de cet avion de combat constituait, à lui seul, un spectacle total.
Rafale et Super Étendard du groupe aérien embarqué patientent avant de décoller.
Guidé par un Hawkeye, les avions de combat de la Marine se sont ensuite présentés en formation serrée. En tête des chasseurs, le Super Etendard n°61 de la 11F était encore revêtu du camouflage gris uniforme utilisé lors du détachement de ces avions embarqués sur la base de Kandahar au cœur de l’Afghanistan quelques mois plus tôt.
Le Groupe Aérien Embarqué composé d’un Hawkeye, de Rafale et de Super Étendard.
Un ravitaillement en vol en plein meeting (même si on suppose qu’aucun transfert de carburant n’a été effectué à ce moment-là), seule la Marine est capable de proposer une pareille manœuvre !
Le SEM n°8 étant en configuration « nounou » avec la nacelle de ravitaillement en vol, c’est tout naturellement que le SEM 33 s’est positionné derrière lui. En général, en meeting aérien, les deux avions gardent très nettement leurs distances. Ce jour-là, pourtant, le 33 avait proprement enquillé le panier. Il n’a pas été offert souvent la possibilité de photographier un véritable ravitaillement en vol en meeting !
Les quatre SEM se présentent au break pendant que le Rafale M n°16 roule vers son parking et que les 3 Alouette se préparent à décoller pour leur somptueuse démo.
Quelques minutes plus tard, au même endroit, le SEM 61, porteur de la livré Afghane et porteur de traces d’une utilisation intensive à bord du CDG.
Trois Alouette effectuèrent ensemble une démonstration combinée d’une très belle coordination et d’une indéniable élégance avant de laisser la place à un Dauphin « Pédro » pour une démonstration de sauvetage.
Récupération d’un pilote éjecté par un Dauphin « Pédro » dont c’est la mission phare.
C’est un visiteur de taille qui est venu ensuite faire un passage remarqué. Tout juste entré en service, notamment chez Air France quelques semaines plus tôt, les occasions d’en apercevoir un en dehors, bien évidemment, des différents salon du Bourget, n’avaient pas encore été très nombreuses. C’est pour cela que le passage d’un A380 au cours du meeting du centenaire n’est pas vraiment passé inaperçu !
Pour beaucoup, le meeting du centenaire fut l’occasion de voir voler pour la première fois un A380.
Parce que la présence des avions de l’US Navy au cours d’un meeting aérien français est plutôt rare, surtout en vol, le clou du spectacle a été l’œuvre de quatre F/A-18E/F du groupe aérien du porte-avion USS Harry S. Truman.
Les avions des VFA-32 et VFA-105 ont effectué plusieurs passages en formation très serrée.
Successeur des F/A-18 « legacy » et surtout du mythique F-14 Tomcat, le Super Hornet est désormais le chasseur emblématique de l’US Navy.
Pendant plusieurs minutes, ce fut un festival de passages en formation serrée à l’extrême. Plus que sa manœuvrabilité ou sa polyvalence, c’est bien la puissance brute du Super Hornet qui a été mise en avant avec l’avantage indéniable d’être une démonstration extrêmement photogénique.
Dernier passage tout sorti du Super Hornet de la VFA-105 avant de retourner se poser sur l’USS Truman.
Un Tigre venu en voisin depuis sa base du Luc est venu ensuite occuper l’espace aérien au-dessus de la base avant qu’un Falcon 50M et un Breguet Atlantique ne viennent clore le spectacle.
Venu en voisin, la présence du Tigre était aussi justifiée par la possibilité de mettre en oeuvre cet hélico de combat depuis un navire de la Marine Nationale comme ce fut le cas l’année suivante lors des opérations contre la Libye.
Le Falcon M en configuration de largage d’une chaîne SAR. Notez les paupières qui protègent la trappe ventrale ouverte et la boule optronique Chlio sortie.
En dépit d’un programme chamboulé par l’interdiction de vol d’un certain nombre d’avions, le meeting du centenaire fut un succès indéniable et ce même si l’affluence record, la presse locale évoquait le lendemain 100 000 spectateurs, a quelque peu débordé l’organisation, en particulier pour les points de restauration et de confort. Sans atteindre la folie que fut, au même endroit en août 1994, la commémoration du cinquantenaire du débarquement de Provence, le meeting du centenaire de l’Aéronautique Navale fut le plus beau meeting aérien offert en France depuis de très nombreuses années et il n’a pas été égalé depuis.
Break serré, vous avez demandé un break serré ?!
(1) Portant le numéro de constructeur 990013 le F-AZZJ a été construit en 2008 par la société Flug Werk. C’est un avion neuf construit selon les plans d’époque mais équipé d’un moteur russe produit sous licence en Chine équivalent au BMW d’origine. Le Focke Wulf a été renfloué quelques jours plus tard et a ensuite été revendu en Allemagne. L’accident était la conséquence de la rupture d’une pièce du moyeu de l’hélice.
(2) C’était le 12e accident de « Léon » au cours d’une carrière d’aviateur exceptionnelle. Sa chance l’a abandonné au 13e, le 14 novembre 2015, lors d’un vol d’essais d’ULM en Alsace.
Le rendez-vous de l’Héliport de Paris-Issy-les-Moulineaux à l’occasion des journées européennes du patrimoine est devenu un des temps forts de l’année aéronautique parisienne. Grâce aux efforts conjugués de l’organisateur et de ses partenaires, la manifestation a pu être maintenue en dépit du contexte difficile que nous connaissons tous.
Bel effort de signalisation de la part d’Aéroports de Paris, à l’occasion des journées du patrimoine sur l’héliport d’Issy-les-Moulineaux.
Depuis les évènements de novembre 2015 et juillet 2016, la sécurisation des manifestations publiques est devenue une affaire sérieuse.
Désormais, il faut s’habituer à être fouillé en toutes occasions et être encadré par des hommes lourdement équipés de fusil d’assaut ou de pistolets-mitrailleurs. Ambiance, ambiance, ambiance ! Mais parce qu’à Issy, tout est différent, les agents en charge de la sécurisation des spectateurs étaient souriants, aimables et ne se sont pas contentés d’une fouille approximative. Leur travail a bien été facilité par des visiteurs enjoués et conscients des enjeux.
Le petit parking bétonné de l’héliport était bien plein avec une bonne dizaine de machines offertes au public sans aucune barrière et avec les équipages toujours à proximité afin de donner toutes les explications possibles. Imaginez le bonheur des petites têtes blondes en train d’investir un véritable EC-135 du Samu !!!
Jouer (au docteur ?) dans un véritable hélicoptère du SAMU, un privilège très apprécié par certains visiteurs, indéniablement.
Les habitués étaient là, avec RTE qui présentait aussi sa nacelle aéroportée d’intervention sur les lignes à haute-tension et la tenue « conductrice » des opérateurs. Le Dragon 75 de la Sécurité Civile était aussi bien là, tout comme un EC-135 de la Gendarmerie et un Fennec de l’EH 1/67 « Parisis » basé à Villacoublay.
Les lignes à haute-tension sont entretenue depuis cette nacelle aéroportée et les techniciens portent des tenues spéciales, conductrices. Les personnels de RTE étaient là pour donner toutes les explications que cette information soulève.
L’Ecureuil F-GMBA, équipé pour les retransmissions télévisuelles était aussi accessible et un opérateur a passé la journée à initier les visiteurs au maniement de la caméra-boule embarquée.
Le F-GMBA photographié en pleine action au-dessus de Courbevoie (92) le 24 juillet 2016 à l’occasion de la dernière étape du Tour de France.
La nouveauté la plus remarquée de l’opération a été la présence du simulateur de Giro Aventures, normalement basé à Epernay-Plivot et composé d’une cellule opérationnelle d’hélicoptère monoplace ULM Classe 6 remotorisée et bridée en hauteur par une potence fixée à une base mobile sur roulettes.
Avec cette machine, il est possible de découvrir en toute sécurité les bases du maniement d’une voilure tournante à proximité du sol pour une fraction du prix à l’heure de vol d’une machine de même classe. L’instructeur se tient à proximité avec une tablette numérique lui servant de pupitre de commandes. Grâce aux roulettes le simulateur dispose d’une certaine mobilité ce qui permet de varier les exercices. A raison de 50 € les 15 minutes d’initiation, l’appareil a rencontré un succès certain !
En s’inscrivant, assez tôt, auprès de l’office de tourisme d’Issy-les-Moulineaux, il était possible de suivre une visite guidée de l’aérogare. Philippe Boulay, Délégué général au Patrimoine au sein de l’UFH a donc présenté longuement à une quarantaine de personnes réparties en deux groupes, l’un le matin, l’autre l’après-midi, l’histoire de l’héliport, son activité et son implantation à travers plus d’un siècle d’exploitation ininterrompue puisque le site demeure la plus ancienne station aéronautique encore en service au monde.
En plus des deux visites, l’infatigable Philippe Boulay a animé une conférence historique reprenant les grandes lignes de l’évolution de la plateforme, depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à aujourd’hui.
La « vigie » de l’héliport, la seule « tour de contrôle de France située au rez-de-chaussée » selon ses occupants habituels.
La visite, débutée sur le tarmac a permis aux visiteurs de découvrir les installations actuelles, les archives de l’UFH et l’importante collection héritée du regretté Lionel Poilâne, boulanger célèbre et passionné d’hélicoptères et s’est terminée dans la salle de contrôle local où les deux contrôleurs ont pu présenter leur activité et leur formation avant de gérer en direct l’arrivée de l’EC-135 de la Gendarmerie et le départ de l’EC-145 de la Sécurité Civile.
Ce dernier a effectivement décollé en fin de mâtinée afin de se livrer à un exercice de treuillage au bénéfice d’une équipe du Groupe d’Intervention en Milieu Périlleux (GRIMP) de la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris. L’exercice s’est déroulé directement sur l’héliport, offrant ainsi une attraction très appréciée par la foule déjà nombreuse et très attentive.
Exercice conjoint de la Sécurité Civile et du GRIMP des pompiers de Paris, à la grande joie des spectateurs présents.
D’ailleurs, en dépit de la manifestation publique, l’activité de l’héliport s’est poursuivie normalement tout au long de la journée, marquée, notamment, par le passage de plusieurs appareils du SAMU en mission. L’occasion de rappeler que, menacé régulièrement par les municipalités parisiennes successives, la plateforme reste indispensables aux Services Publics puisque la plupart des hôpitaux parisiens ne disposent d’aucune hélistation et que la plupart des transferts vitaux, de malades en urgence ou bien d’organes à greffer, doivent transiter par Issy-les-Moulineaux.
Arrivée d’un appareil médicalisé. Connaît-on vraiment le nombre de vies sauvées par les appareils passés par Issy-les-Moulineaux ?
Les arguments des nuisances sonores sont, eux, battus en brèche par l’activité actuelle limitée à seulement 10 000 mouvements annuels (30 atterrissages ou décollages par jour) opérés par des machines modernes beaucoup plus discrètes que les précédentes. Ceux portant sur la pollution provoquée par ces machines provoquent mon hilarité générale puisque l’héliport est juste situé au pied… du périphérique…
L’héliport est un espace vert où les abeilles ne sont pas plus dérangées par les hélicos qu’elles ne le seraient par le passage des tracteurs dans un champs de la campagne française. Ici, elles prospèrent loin des pesticides… et des voleurs !
L’espace vert que constitue l’essentiel de la surface occupée par la plateforme aéronautique, est, du coup, mis à profit par plusieurs associations, présentes lors de la manifestation, qui ont démontré aux visiteurs que le champ d’aviation tenait un rôle écologique majeur. En plus des oiseaux et de certaines espèces végétales, ce sont peut-être les abeilles, l’héliport abrite en effet plusieurs ruches, qui profitent le plus de cet emplacement privilégié. Outre l’absence de pesticides, celles-ci profitent incidemment de la sécurisation du site par la gendarmerie pour prospérer loin d’éventuels voleurs d’essaims, un fléau qui touche de nombreux apiculteurs en milieux ouverts.
Pour le reste, il suffit de laisser les équipages de la Sécurité Civile, de la Gendarmerie et du Samu raconter leur nuit du 13 au 14 novembre 2015 pour comprendre l’intérêt de pouvoir disposer de voilure tournantes à l’immédiate proximité d’une métropole majeure.
Cette Alouette II de collection, au couleurs de la Marine, a peut-être été un rappel aux riverains de l’évolution sonore des appareils à voilure tournante…
Le soir venant, les appareils de passage sont repartis, mettant ainsi un terme à une journée passionnante qui a laissé ses organisateurs fourbus mais heureux, une fois de plus, d’avoir reçu le public en nombre, dans d’excellentes conditions, avec une implication totale de tous les intervenants et dans un esprit de convivialité remarquable. Cette nouvelle édition des Journées du Patrimoine sur l’héliport a été, une fois de plus, un véritable succès. Pensez-y pour l’année prochaine !
Malgré ses 11 000 heures de vol, l’Alouette II 1003 F-AZYQ n’a jamais semblé aussi fringante !