Le 11 septembre 2017 l’armée de l’Air française commémorait la disparition de son héros emblématique, Georges Guynemer, as aux 53 victoires et capitaine dans l’escadrille n°3 « Les Cigognes » disparu « en plein ciel de gloire » il y a tout juste un siècle. Autour de ce centenaire, ce sont les « As » de l’aviation française de la grande boucherie qui sont célébrés.
Le mot « As » est aujourd’hui bien galvaudé et n’importe quel aviateur capable de tourner une boucle à peu près potable peut rapidement s’en voir qualifié. Pourtant, il y a un siècle, ce mot était un titre « nobiliaire » recherché. Il fallait avoir combattu « le Boche » et avoir obtenu 5 victoires aériennes, ou plus. Les noms aujourd’hui oubliés de ces héros, les Fonck, Madon, Flachaire, Gilbert ou Bourjade, résonnaient dans les quotidiens, pourtant soumis à une censure intransigeante. Leurs exploits étaient célébrés, et lorsque l’un d’eux tombait, c’était un coup porté au moral de l’arrière et aux soldats enterrés dans la boue des tranchées.
5 victoires aériennes pour un titre. C’est à la fois peu et énorme. 16 834 aviateurs français ont été brevetés pilote pendant la durée de la guerre, ils revendiquent un total de 3 950 victoires aériennes officielles. 1 814 de ces appareils sont tombés sous les balles des 189 as de l’aviation militaire française, la moitié des victoires pour 1% des aviateurs.
Si les commémorations autour du centenaire de la Grande Guerre ont été nombreuses – et ce n’est pas terminé – celles évoquant le souvenir des aviateurs de la période sont plus discrètes. A cela, rien d’étonnant, on ne peut pas comparer le sacrifice des « poilus » des tranchées à ceux des aviateurs, néanmoins, les uns sont morts comme les autres et chacun avait une mission à faire pour finir par chasser les « boches ».
Lors du défilé de la victoire, les aviateurs avaient défilé à pieds comme pour ramener à terre ceux que la gloire avait parfois porté au nues. Les intéressés avaient parfois ressenti ceci comme une mesure vexatoire ce qui avait poussé l’un d’eux, Charles Godefroy, à convier les caméras des actualités pour immortaliser son passage sous l’Arc de Triomphe le 7 août 1919, à l’aube, à bord d’un chasseur Nieuport, tout juste trois semaine plus tard.
Passer en avion sous l’Arc de Triomphe, il n’en est plus question, l’immense drapeau qui flotte sous ses arches rend l’exploit désormais heureusement impossible.
L’armée de l’Air n’a cependant pas oublié ses premiers héros et a organisé une cérémonie commémorative aux Invalides le 22 septembre 2017. A cette occasion plusieurs aviateurs s’étant particulièrement distingués sur les théâtres d’opération récents ont été décorés. En point d’orgue, la cérémonie a été survolée par la Patrouille de France.
Les Alpha Jet étaient suivis, quelques secondes plus tard par un box de quatre Mirage 2000-5 de l’Escadron de Chasse 1/2 Cigognes. Cette unité de défense aérienne basée à Luxeuil, est l’héritière directe du Groupe de Chasse 12 et comporte encore aujourd’hui les escadrilles SPA 3 (où volait Guynemer), SPA 26 (dont fit partie un certain Roland Garros), et SPA 103 (René Fonck).
Bizarrement, la présence du Mirage 2000 porteur de la décoration spéciale hommage à Guynemer n’a été confirmé que la veille de l’évènement – le contraire aurait été, quelque part, un non-sens – et c’est bien en tête de sa formation que le Mirage 2000-5 5-EJ a survolé Paris.
L’emblématique Guynemer a laissé à l’armée de l’Air une devise, apocryphe, mais néanmoins appliquée au fronton de l’École de l’Air de Salon de Provence, « Faire Face ». Un message plus convenable que les « couic ! » ou « faut que ça dégringole ! » qui émaillaient ses courriers lorsqu’il relatait à ses proches ses combats aériens victorieux. Son souvenir reste vif avec la cérémonie annuelle commémorative du jour de sa disparition sur toutes les bases française.
Comme ce fut le cas avec les décorations individuelles des Alpha Jet de la PAF, chacun portant la marque d’un de ces grands as, il est heureux d’avoir associé au souvenir de Guynemer, en cette année du centenaire, le souvenir de ses compagnons d’arme. Ce défilé aérien, court mais chargé de symbole n’en était que plus touchant.